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Emigration ou dépopulation ? Le cas arménien



Plongés dans un contexte économique, géopolitique et social précaire, des milliers d'Arméniens quittent le pays chaque année. Il ne s'agit plus, selon le sociologue Guevork Poghossian, de migration mais de dépopulation.

Combinés au vieillissent de la population, à la chute de natalité et aux avortements sélectifs, entre autres, ces départs en masse sont un véritable danger pour le pays. Les raisons invoquées restent les mêmes depuis des années : absence de travail, corruption, manque d'indépendance du pouvoir judiciaire, déclin du service public et de façon plus générale, une impossibilité à se projeter dans un futur qui leur semble compromis. Aujourd'hui 74% des Arméniens souhaitent quitter temporairement le pays; 42% de façon définitive.

Cet exode a un coût social, économique, humain et met en danger la sécurité nationale à moyen terme.

Cela doit être aussi un sujet de préoccupation, également pour la diaspora. Si l'importance et la fonction d'une diaspora ne sont plus à démontrer, le mode de cette implication reste déterminant. L'exposition aux valeurs démocratiques des Arméniens de France, de Suisse ou des Etats-Unis par exemple doit faire d'eux de fervents défenseurs de la démocratie et des droits de l'homme, des agents importants par un rôle incitatif essentiel.

Il est temps de prendre en compte les voix de la société civile arménienne. Si la diaspora s'est concentrée sur les questions de sécurité et cela à juste titre, elle doit peut être s'unifier autour d'une voix publique, démocratique, indépendante et crédible et sortir des initiatives privées, éparses et liées seulement au monde des affaires ou de la bienfaisance.

Bien des efforts sont nécessaires de part et d'autre, notamment par l'Arménie qui doit cesser de voir dans la diaspora un acteur économique selon "son goût" (fondations par dizaines, associations par centaines, donations directement au gouvernement ou subventions aux entreprises) pour en faire un acteur économique dans son ensemble. Il faudrait pour cela mettre un terme au "rapt" de l'Etat par les clans et les oligarques.

Quant à la diaspora qu'on souhaiterait dans son fonctionnement plus participative, il lui faudrait analyser pragmatiquement les raisons de l'enclavement de l'Arménie et constater qu'un développement autarcique met en péril ce pays, par exemple.

La crise démographique arménienne soulève bien des questionnements. Si l'Arménie n'est pas mon pays, il n'en reste pas moins que mon peuple y vit et qu'il serait absurde de penser que si par manque d'engagement de ma part et de nous tous il était en péril je n'en serais pas profondément affecté.

L'existence même de l'Arménie m'engage à sortir de l'entre deux, être d'ici et de là bas. Même si le centre de la nation arménienne n'est pas nécessairement Erevan, il n'en reste pas moins que je choisis d'être en dehors de l'Etat, mais au sein de la nation.

"L'exil, c'est la nudité du droit". Victor Hugo

Alain Navarra-Navassartian


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