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Conflit du Karabagh : Une paix juste respectant les droits des Arméniens est-elle encore possible ?

Dernière mise à jour : 6 oct. 2021

Alexis Krikorian

Timble azéri montrant la "désinfection" de la population arménienne du Karabagh

La guerre de 44 jours qui a ravagé le Karabagh à l’automne dernier a rabattu les cartes dans la région, marquant l’entrée fracassante de la Turquie dans le règlement d’un conflit vieux d’un siècle déjà si l’on ne met pas de côté la parenthèse soviétique. Cette guerre, menée par l’Azerbaïdjan avec le soutien plein et entier de la Turquie et de centaines de mercenaires djihadistes syriens, contre les Arméniens du Karabagh, fut d’une violence inouïe. Ces deux pays ont en effet décidé de prendre par la force et la violence le pouvoir dans un État sur lequel ils n’exerçaient aucun contrôle depuis au moins 30 ans et dont le statut international faisait l’objet de négociations dans le cadre du groupe de Minsk de l’OSCE (co-présidé par la France, la Russie et les Etats-Unis). Ce dernier, plus que passif pendant la guerre, après avoir laissé se développer une rhétorique haineuse anti-arménienne et revancharde pendant de si nombreuses années, essaie aujourd’hui, bien timidement (quelles pressions sur l’Azerbaïdjan dont un documentaire sur Arte vient de rappeler à quel point le pays avait corrompu les élites occidentales et européennes en particulier[1] ?), de reprendre la main, alors même qu’Aliev déclare à qui veut l’entendre que la question du Karabagh est désormais réglée, par la force. Pour Bakou et Ankara, il ne reste plus qu’à l’Arménie (harcelée qu’elle est tous les jours sur ses frontières, à l’intérieur même de ses frontières, dont on bloque les routes[2] ou incendie les forêts, etc.) qu’à reconnaitre l’intégrité territoriale de l’Azerbaïdjan et donc à reconnaitre la perte définitive du Karabagh et tout ce qui s’en suivra (dépeuplement et destruction du patrimoine arménien). A la tribune de l’ONU, à New York, Aliev a d’ailleurs enjoint la communauté internationale à ne plus utiliser le terme de « Nagorno-Karabagh[3] ». Ce conflit semble au final conjuguer à merveille le droit du plus fort, porté par la Russie, la Turquie et l’Azerbaïdjan, et la diplomatie du carnet de chèque et de l’ouverture des marchés portée par les Etats-Unis, la Russie et l’Union européenne au détriment des droits du peuple arménien à la vérité, à la justice, et à la vie sur ses terres ancestrales. Une réorientation fondamentale la politique étrangère de l’Arménie, sous la houlette de Pachinyan, et qui serait compatible avec les intérêts de toutes ces grandes puissances dans la mise en place d’une paix « néo-libérale » ou « néo-impériale » (définies plus bas) semble en effet aujourd’hui être à l’œuvre. Est-elle pour autant une fatalité ?


Une guerre planifiée de longue date avec l’accord tacite de la communauté internationale ?


Pour qui s’intéresse un tant soit peu à la politique internationale, il était évident que la Turquie et l’Azerbaïdjan (qui constituent, selon leur devise, « deux États, une nation ») allaient attaquer l’Arménie et avec quels buts de guerre ils allaient le faire. La force des images s’explique souvent par la capacité qu’elles ont à tout dire en un instantané. Il en va ainsi, par exemple, de la photo ci-dessous qui représente le logo d’exercices militaires organisés par la Turquie et l’Azerbaïdjan en 2019. Sur cette photo, bien évidemment, le Karabagh arménien n’est plus. Le sud même de l’Arménie a disparu, permettant de faire le lien entre la Turquie et l’Azerbaïdjan, entre la Turquie et monde turcophone d’Asie centrale. Une bonne partie de l’Arménie a disparu, conformément aux revendications territoriales exprimées par Aliev à Bakou le 10 décembre 2020 sur le sud de l’Arménie, sur Erevan et sur le lac Sevan. Pour continuer de mettre la pression sur une Arménie défaite et déboussolée et marquer le caractère azéri du Haut-Karabagh, les armées des deux pays ont d’ailleurs à nouveau mené des exercices militaires de grande envergure dans la région de Kars, à proximité du nord-ouest de l’Arménie en février 2021[4]. C’est dans cette ville frontière que le maire, membre du Halklarn Demokratik Partisi (HDP, pro-kurde), avait été arrêté le 25 septembre 2020 en prémices à l’offensive azéro-turque du 27 septembre. De même, 10 mois après le cessez-le-feu, en toute illégalité et en toute impunité, des dizaines de prisonniers de guerre arméniens sont toujours retenus en otage par l’Azerbaïdjan afin de faire pression sur l’Arménie pour qu’elle fasse toujours plus de concessions à l’axe panturc. Des exercices militaires turco-azéris ont également commencé de l’autre côté de l’Arménie, près du couloir Latchine reliant l’Arménie au Karabagh[5], le 7 septembre 2021. Le lendemain, le 8 septembre, le Premier Ministre arménien déclarait qu’il était prêt à discuter avec la Turquie. Quelques jours auparavant, contre toute évidence, il déclarait déjà avoir entendu des signaux positifs de la part de la Turquie. En parallèle, on entend une musique monter dans certaines ONG arméniennes soutenues par l’Union européenne selon laquelle il faudrait que l’Arménie dépriorétise la question de la reconnaissance du génocide des Arméniens.

Logo des exercices militaires turco-azéris de 2019. Le Karabagh n’est plus, la moitié de l’Arménie a disparu (s’est fondue dans le rouge turc) et le lien entre la Turquie et l’Azerbaïdjan est réalisé par le sud de l’Arménie qui n’existe donc plus. La guerre contre le peuple arménien, planifiée, fut totale, avec un recours à des moyens matériels et humains considérables. Les villes arméniennes du Haut-Karabakh, dont la capitale Stepanakert, ont été bombardées sans relâche. 80 % des bâtiments de la ville de Martouni ont été détruits ou endommagés[6], par les bombardements azéris. L’Arménie a perdu plus de 4 000 jeunes hommes en 44 jours de guerre[7]. Pour une démocratie de 3 millions d’âmes, c’est un lourd tribut. Un peu comme si la France, le Royaume-Uni ou l’Italie avaient, chacune, perdu 80 000 jeunes hommes sur une période de 44 jours. Sans compter les milliers de blessés (11 000) et de mutilés à vie par les armes les plus sophistiquées comme les drones kamikazes israéliens et les drones Bayraktar turcs. Le 10 novembre 2020, une déclaration de cessez-le-feu[8] aux clauses léonines a été imposée à l’Arménie. Cette dernière a perdu de nombreux territoires, dont la ville symbole de Chouchi, sans pour autant obtenir, bien au contraire, de garantie sur le statut du Karabagh, et ce malgré le sang versé. Le point 9 de la déclaration de cessez-le-feu sur le déblocage des liaisons économiques et de transport dans la région, notamment entre l’Azerbaïdjan et l’exclave du Nakhitchevan, ne cesse d’interroger sur l’effectivité de la souveraineté que l’Arménie aura à l’avenir sur le sud même du pays, à savoir la région du Syunik qui a été revendiquée à de nombreuses reprises par l’Azerbaïdjan, et ce depuis plusieurs années[9] et qui est en partie occupée par l’Azerbaïdjan depuis le printemps 2021. En 2025, l’Azerbaïdjan pourra par ailleurs demander le départ des 2 000 militaires russes qui sont venus se déployer dans ce qu’il reste du Karabagh dès le lendemain de la signature du cessez-le-feu. Les Arméniens du Karabagh seront alors à la merci d’un régime qui a érigé le racisme anti-arménien au rang de racisme d’État. Peu après leur victoire, le président azéri Aliev a déclaré que les Arméniens avaient fui comme des « chiens[10] », alors qu’Erdogan déclarait que « le chiffon » (le drapeau arménien) ne flottait plus dans le ciel du Karabagh qui était désormais embelli par « les étoiles et les croissants[11] » (les drapeaux azéri et turc). Lors de la parade de la victoire à Bakou le 10 décembre 2020 (journée internationale des droits humains !), Aliev a à nouveau réclamé comme sien la moitié de la République d’Arménie et Erdogan a entonné les louanges d’Enver Pacha, l’un des architectes du génocide des Arméniens, par ailleurs responsable du massacre de 10 000 Arméniens dans la même ville de Bakou en 1918. Les nombreux crimes de guerre de l’Azerbaïdjan ont été documentés. En voici quelques-uns : * utilisation de bombes à sous-munitions, * utilisation de munitions incendiaires, * décapitations, * recours à des mercenaires djihadistes syriens. Face à cela, plus de la moitié[12] de la population du Karabagh a fui les bombes et les massacres dont elle savait qu’ils auraient été inéluctables si les Arméniens du Karabagh avaient perdu l’ensemble de leur territoire[13]. Le 22 octobre 2020, l’association internationale des universitaires spécialisés sur les questions de génocide (IAGS) publiait en effet une déclaration sur la « menace génocidaire imminente provenant de l'Azerbaïdjan et de la Turquie contre l'Artsakh [Haut-Karabakh] »[14]. Dans des conditions normales, non marquées par l’impunité remarquable dont jouit l’axe Bakou-Ankara, l’Azerbaïdjan aurait déjà perdu, depuis fort longtemps, tout droit moral sur le Haut-Karabagh et ses habitants et la sécession remède aurait été décrétée avec force par la communauté internationale, comme cela fut le cas dans le passé récent pour le Kosovo ou Timor-Est. Le crime, dans le cas de l'Arménie, continue de payer, encore et encore. Alors, pourquoi les Arméniens et leurs droits pèsent-ils si peu dans la balance ? Pourquoi, dans leur cas, la souveraineté territoriale l’emporte-t-elle, pour reprendre une expression un peu surannée, sur le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ? Il y a plusieurs raisons dont deux sont absolument évidentes : - La Turquie est un membre « estimé » de l’OTAN[15] (laquelle organisation avait trouvé plus avantageux, dans le cas du Kosovo, de mettre en avant le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes). - L’Azerbaïdjan fournit du gaz et du pétrole à l’Europe, tout en y exerçant une stratégie d’influence grâce à des moyens financiers quasiment illimités. Le Trans Adriatic Pipeline (TAP), financé par la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), la Banque européenne d’Investissement (BEI, banque de l’UE) et 17 banques européennes, l’un des projets les plus « stratégiques » d’Europe d’après ses promoteurs, a en effet commencé à livrer du gaz azéri à l’Europe, quelques jours seulement après le cessez-le-feu du 10 novembre 2020. Les principaux actionnaires du TAP sont la Socar, la société pétrolière et gazière d’Etat en Azerbaïdjan, BP, la SNAM (Italie), ENAGAS (Espagne), Fluxys (Belgique) ou encore, dans une moindre mesure, des cantons suisses comme Zurich ou Aargau. Le siège du TAP est domicilié dans le canton de Zoug (Suisse). Bpifrance (450 millions d’euros), Euler Hermes (280 millions d’euros) et SACE (700 millions d’euros) ont assuré la couverture d’une partie du financement du projet[16]. Bref, un concentré d’Europe qui explique sans doute en grande partie la « neutralité » affichée par les Européens (et les occidentaux) dans cette affaire, malgré les déclarations encourageantes (et malheureusement sans lendemain) d’Emmanuel Macron[17] au tout début de la guerre.

Le même jour que Macron, Mike Pompeo, le Secrétaire d’État américain de l’administration Trump déclarait que le Karabagh était un « piece of real estate »[18], suggérant ainsi, je le crois, que le plus offrant pouvait s’en « saisir ». Comme on pourrait se saisir du sexe d’une femme, comme le revendiquait l’ancien « boss » de Pompeo à la Maison blanche. La chaine d’information américaine CNN[19]nous a par ailleurs appris que Trump, pendant son mandat, parlait avec Erdogan jusqu’à deux fois par semaine au téléphone. En 2019, la décision de Trump de retirer les forces américaines de Syrie, a ensuite permis à la Turquie d'attaquer les Kurdes. Eux, qui avaient pourtant aidé les États-Unis à combattre l’État islamique. Cette décision fut directement liée, d’après ce même article, à la capacité d'Erdogan à obtenir ce qu'il voulait de Trump au téléphone.

Rappelons enfin que l’ancien conseiller à la sécurité nationale de Trump, Michael Flynn, avait écrit un article dans « The Hill », intitulé « Il nous faut voir le monde dans la perspective turque » le jour même de l’élection de Trump en novembre 2016[22]. Depuis, le titre de l’article a été modifié et une note de l’éditeur a été ajoutée : « Le 8 mars 2017, quatre mois après la publication de cet article, le général Flynn a déposé des documents auprès du gouvernement fédéral indiquant qu'il avait gagné 530 000 dollars l'automne dernier pour des travaux de consultation qui auraient pu aider le gouvernement turc. Dans ces documents, Flynn a révélé qu'il avait reçu des paiements d'Inovo BV, une société néerlandaise détenue par un homme d'affaires turc ayant des liens avec le président turc et qu'Inovo avait examiné le projet avant qu'il ne soit soumis au Congrès. Ni le général Flynn ni ses représentants n'ont divulgué cette information lors de la soumission de l’article ».

Une administration Biden aurait-elle fait plus pour arrêter le bain de sang à l’automne 2020 ?

La question mérite d’être posée tant le département d’État considère avant tout l’importance de la Turquie au sein de l’OTAN, alliance au sein de laquelle les deux pays utilisent, par exemple, la base militaire d’Incirlik, en Turquie, où les États-Unis disposent par ailleurs de 50 bombes nucléaires[23]. Il convient de noter ici que cette base militaire a en partie été construite sur des terres volées à des familles arméniennes pendant le génocide de 1915[24], lesquelles familles n’ont jamais pu obtenir justice aux États-Unis.

Deux jours après la reconnaissance historique du génocide des Arméniens par le président Biden le 24 avril 2021, le secrétaire d'État Antony Blinken annonçait au Congrès[25] que l’Administration fédérale prolongeait une dérogation au Freedom Support Act permettant le maintien de l’aide militaire américaine à l'Azerbaïdjan, aide qui a grimpé sous l’Administration Trump à plus de 100 millions de dollars sur la période 2018-19 (contre moins de 6 millions de dollars en 2016-2017)[26]. Une somme colossale pour un pays pourtant riches en hydrocarbures comme l’Azerbaïdjan ! D’un côté, l’administration Biden a donc tenu parole en reconnaissant le génocide des Arméniens. Mais, d’un autre côté, elle l’a trahie en maintenant une aide militaire importante à l’Azerbaïdjan. Le candidat Biden avait promis d’y mettre en terme en raison du rôle d’ « instigateur » de ce pays dans la deuxième guerre du Karabagh[27] [28]. Ces décisions contradictoires vont, pour certains observateurs comme Michael Rubin[29], saper la confiance, réduire davantage encore l'influence américaine dans la région et pourraient même accroître la probabilité d'une reprise du conflit. Il avait vu juste, car 16 jours après cette prise de décision inique, l’Azerbaïdjan, encouragé dans son irrédentisme, envahissait le territoire arménien en plusieurs points, à l’aide de 1000 hommes environ[30].

Il convient en effet de noter que l’aide militaire est maintenue à un État qui nie le génocide des Arméniens avec force, qui détient encore, au moment où ces lignes sont écrites (septembre 2021), environ 200 prisonniers de guerre arméniens, qui détruit le patrimoine arménien au Karabagh (ou lui ôte son caractère arménien) et qui occupe le territoire arménien en plusieurs points[31]. En toute impunité. Le Département d'État avait dans un premier temps repris à son compte la désignation mensongère de l'Azerbaïdjan qui qualifie les prisonniers de guerre arméniens de « détenus »[32], ce qui a permis, de manière éhontée et en contradiction flagrante avec, par exemple, le rapport de Human Rights Watch du 19 mars 2021[33], de placer ces derniers en dehors de la protection du droit international, y compris de la troisième Convention de Genève relative au traitement des prisonniers de guerre. Avec retard, une déclaration conjointe de la co-présidence du groupe de Minsk (États-Unis, France, Russie) du 13 avril 2021 désigne enfin les prisonniers de guerre arméniens comme tels et demande leur libération[34]. Cependant, le discours fluctue. Dans leur déclaration du 5 mai 2021[35], par exemple, les co-présidents du groupe de Minsk, suite à la libération de 3 prisonniers de guerre arméniens, ne parlent plus de prisonniers de guerre mais seulement de « détenus » et de « prisonniers » .

Dans ce contexte, que vaut la reconnaissance du génocide des Arméniens par l’Administration Biden qui, contrairement à son prédécesseur démocrate Barack Obama, a honoré sa promesse de campagne[36] sur cette question-là ? Cette déclaration présidentielle[37] est sans aucun doute un jalon important à tout le moins d’un point de vue moral. Dans le contexte d’une aide militaire massive maintenue à l’Azerbaïdjan, renforcera-t-elle pour autant l 'approche des États-Unis en matière de prévention des génocides (y compris culturels) et des atrocités de masse dans le sillage de la loi Elie Wiesel sur la prévention des génocides[38] ? Permettra-t-elle aux familles spoliées (comme celles de la base d’Incirlik en Turquie) d’enfin obtenir des réparations ? Permettra-t-elle de conduire à une reconnaissance universelle du génocide des Arméniens ? Permettra-t-elle d’aboutir à une paix juste dans le Caucase du Sud ?

Ces deux décisions contradictoires de l’Administration américaine du 24 avril 2021, sur la reconnaissance du génocide des Arméniens, et du 26 avril 2021, sur le maintien d’une aide militaire à l’Azerbaïdjan, montrent que cette administration a cherché à ménager les intérêts de ses industriels et la question des droits humains en Turquie et dans la région. Au final, aurait-elle fait plus que l’Administration Trump pour arrêter le bain de sang à l’automne 2020 ? Probablement oui, même si rien n’est sûr, lorsque l’on voit la réaction timorée des États-Unis à l’invasion du territoire arménien en plusieurs points en mai 2021[39].

De la nécessaire reconnaissance du génocide des Arméniens par la Turquie elle-même

La déclaration portant reconnaissance du génocide des Arméniens par les États-Unis en fait, à raison, une question de droits humains. Dans un monde qui commence enfin à s'attaquer à la question du racisme systémique, le but ultime de tout défenseur des droits humains est la reconnaissance du génocide des Arméniens par la Turquie elle-même, où les droits humains seraient alors enfin respectés. Dans un pays où l'appareil d'État s'enfonce plus que jamais dans une posture négationniste (un « institut de recherche » niant le génocide des Arméniens a par exemple été créé en juillet 2021 par le Conseil de l'enseignement supérieur de Turquie [40]), le chemin sera long. Il requiert l’engagement sans failles de petites ONG résolues comme Hyestart, ONG que j’ai cofondée avec le sociologue et historien de l’art Alain Navarra en 2017 dans le but de promouvoir la démocratie et les droits humains en Turquie et en Arménie[41], aussi bien que celui des plus grandes institutions tant gouvernementales que non gouvernementales. Nombreux sont ceux qui, y compris au sein des ONG, mettant les nationalismes turc et arménien sur un même plan, ont et continuent de faire, a minima, une erreur d’analyse. Car ne nous y trompons pas, c’est bien l’Arménie qui est la victime séculaire du nationalisme turc, le génocide de 1915 n’étant que le point culminant d’une série de massacres qui avaient commencé dès la fin du 19ème siècle sous le sultan Abdülhamid II[43]. L’histoire est indubitablement dans une forme de répétition. Abandonnée lâchement par l'occident, et dans une moindre mesure également par la Russie, qui a elle aussi affiché sa neutralité lors du conflit, les Arméniens ont à nouveau payé le prix lourd leur droit à la vie. L’impunité du génocide des Arméniens permet indubitablement l’inscription de la persécution des Arméniens dans la durée. Dans ce contexte, comme le relève la militante et philanthrope Anna Astvatsatuvian Turcotte, l’expression « nationalistes arméniens » a clairement été utilisée en occident (notamment dans les pays anglophones) en tant qu’arme contre les légitimes revendications des Arméniens à la justice et aux réparations. La carte ci-dessous est édifiante : elle illustre la réduction drastique des territoires de vie des Arméniens depuis le génocide de 1915, pris en étau entre ce qui allait devenir les Républiques de Turquie et d’Azerbaïdjan.

Source : haymapa on Reddit. Face à cela, face aux mensonges éhontés des médias turcs et azéris (qui ont notamment affirmé que c’est l’Arménie qui avait attaqué le 27 septembre 2020, tout en étant sur place en Azerbaïdjan pour y faire des direct live !), face à une guerre de l’information payée à coups de millions de dollars, la neutralité affichée par les pays occidentaux pendant la guerre fut et demeure scandaleuse. Le moment choisi pour déclencher la guerre, l’élection américaine et la pandémie de Covid 19, ne peut en aucun cas constituer une excuse sérieuse à cette neutralité active, qui a pour conséquence de jeter l’Arménie dans les bras de la Russie plus qu’avant encore. Car quelle autre option ce pays sans ressource naturelle a-t-il pour assurer sa sécurité, alors que l’Azerbaïdjan et la Turquie menacent a minimade s’emparer du sud de l’Arménie ? Alors que « notre alliée » la Turquie construirait des bases militaires en Azerbaïdjan[44] [45]? L’Arménie prisonnière de l’ « Alliance russe » (qui a néanmoins, et c’est tout le paradoxe, le mérite d’exister) L’ « alliance » russe est pour l’Arménie une alliance captive au service de la relation turco-russe. En regardant la déclaration du ministre russe des Affaires étrangères Lavrov du 13 mai 2021[46], qui met en avant la déclaration tripartite du 11 janvier 2021 sur le développement économique de la région et ne condamne certainement pas l'intrusion d'Aliev en territoire arménien, on ne peut s'empêcher de se demander si les Russes n'ont pas donné une forme de feu vert à cette intrusion. Le soupçon est d’autant plus fort que l’ Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), l’organisation de défense sous l’égide de la Russie censée défendre l’intégrité territoriale de ses membres s’ils sont attaqués, dont l’Arménie, est restée les bras ballants tout au long de la crise. Le ministre de la défense du Bélarus, qui est également membre de l’OTSC, a rendu visite à l’Azerbaïdjan afin de signer des accords de coopération avec son homologue azéri le 20 mai 2021, en pleine crise pour l’Arménie[47]. La Russie n’a jamais condamné l’invasion du territoire Arménien soulignant ainsi, me semble-t-il, son unité de vue avec l’axe Bakou- Ankara dans la réalisation de son but de guerre : une liaison terrestre entre les deux républiques turques par le territoire arménien. La Russie a, historiquement, déjà cédé de nombreux territoires arméniens à l’axe Bakou – Ankara (le Karabagh, le Nakhitchevan, etc.). Que la démonstration soit faite de l’inutilité de l’OTSC pour ses membres non russe lui importe peu. L’Arménie est un sujet aux droits limités qui reste de toute façon captive de cette « alliance » sous domination russe. Car l’Arménie a-t-elle vraiment une alternative en matière de sécurité?


On l’a vu, les États-Unis portent également une part de responsabilité dans cette débâcle arménienne : en maintenant son aide militaire à l'Azerbaïdjan - malgré la promesse électorale de Biden d'y mettre un terme[48], l’exécutif américain a encouragé Aliev à poursuivre ses projets irrédentistes. Il a fallu attendre le 28 juillet 2021 pour que la branche législative commence à s’exprimer très clairement sur le sujet avec le vote à l’unanimité d’un amendement à la Chambre des Représentants bloquant l’aide militaire à l’Azerbaïdjan[49], le jour même d’une attaque azérie d’envergure en territoire arménien (voir ci-dessus) et le jour où le Président de l’Assemblée nationale turque, Mustafa Sentop, en visite à Bakou avec son homologue pakistanais aurait qualifié l'Arménie de « menace pour la stabilité régionale » et aurait discuté des plans de création d'une « armée turque » conjointement avec l'Azerbaïdjan[50]. Le Pakistan est par ailleurs, il convient de le souligner, le seul pays au monde qui ne reconnait pas l’existence de la République d’Arménie[51]. Après la Chambre des Représentants, il faudra que le Sénat s’exprime à son tour.

La diplomatie du carnet de chèque de l’Union européenne est-elle destinée à ce que l’Arménie réoriente de fond en comble sa politique étrangère et ne défende plus les droits du peuple arménien ? Le 3 juillet 2021, réitérant l’opération du 13 juin, 15 prisonniers de guerre arméniens ont été libérés « en retour de la décision prise par Erevan de préciser à Bakou la position de champs de mines installés dans la « zone disputée[52] » ». Or la libération des prisonniers de guerre devrait se faire sans condition. La prise d’otage est un crime de guerre et est également un crime en droit azéri[53]. L’accord de cessez-le-feu du 10 novembre 2020 signé par l’Arménie, l’Azerbaïdjan et la Russie prévoit aussi un échange des prisonniers de guerre sans condition en son point 8[54]. L’UE a salué l’opération du 3 juillet 2021 et soutiendrait donc la conditionnalité de ces libérations. Le Drian, Ministre français des affaires étrangères, a abondé dans le même sens dans sa lettre de félicitations envoyée au nouveau ministre arménien des affaires étrangères, Mirzoyan. Sur la question de l’invasion du territoire arménien en plusieurs points, l’UE s’est illustrée par des déclarations à la fois vides et peu utiles[55], reflétant sans doute une division au sein des États Membres sur la question. Le 16 juillet 2021, le Président du Conseil européen Charles Michel, en visite à Erevan, a d’ailleurs parlé de « zones discutées[56] » au sujet des territoires envahis par l’Azerbaïdjan, parfois sur plusieurs kilomètres et l’aide de 1000 soldats[57] au moins. Au sujet du Karabagh, territoire dans lequel l’UE n’a jamais investi, il est resté très prudent, indiquant dans ce même discours que le « statut du Karabagh doit pouvoir être abordé », alors qu’Aliev ne cesse de clamer que la question du Karabagh a été réglée par les armes[58]. Michel n’a d’ailleurs pas eu le courage de répéter le terme de « statut » à Bakou le jour suivant, où il a prononcé l’énigmatique phrase suivante : « nous pensons qu'une paix, une paix durable, suppose que de bons accords puissent être pris et puissent être respectés. Cela veut dire qu'il y a d'autres questions qui devront être aussi abordées tôt ou tard afin que cette paix durable puisse être une réalité dans l'intérêt de la stabilité, de la prospérité et de la sécurité[59] ». A Erevan, Michel avait visité le monument au génocide des Arméniens. Sur Twitter, il avait indiqué rendre hommage « aux victimes arméniennes », sans préciser de quelles victimes il s’agissait. Cet homme, qui s’était déjà illustré par son manque de soutien à Ursula von der Leyen dans l'affaire du Sofagate, n'a pas nécessairement le courage comme vertu première. Dans la capitale culturelle du Karabagh, Chouchi, occupée par l’Azerbaïdjan suite à la deuxième guerre du Karabagh, l’Azerbaïdjan a d’ailleurs organisé une visite des ambassadeurs en poste à Bakou. 46 ont répondu à l’appel, dont les ambassadeurs de Turquie, de Suisse, de Belgique, de Croatie, de Hongrie, de Géorgie, d’Italie ou encore d’Israël. Parmi ces pays, des pays alliés de l’Azerbaïdjan comme la Hongrie ou Israël. Mais aussi des pays probablement attirés par les millions liés à la « reconstruction[60] » engagée par Bakou. Plus surprenant, l’ambassadeur de Grèce, censé être un allié de l’Arménie, a également été du déplacement. Les trois co-présidents du Groupe de Minsk (États-Unis, France, Russie), dont le but est la recherche d’une solution pacifique et négociée au conflit du Haut-Karabagh, ont heureusement refusé de se plier à cette mascarade en déclinant l’invitation azérie de se rendre à Chouchi le 10 juillet 2021[61]. La liste des pays ayant cédé aux sirènes de Bakou sur le Karabagh montre bien que les États-Membres de l’UE sont, sur cette question comme sur d’autres, divisés quant à l’attitude à adopter. Prise sans doute d’une forme de remords pour la neutralité politique qu’elle a affichée pendant la deuxième guerre du Karabagh, l’UE (l’on peut émettre l’hypothèse que la France a joué ici un rôle) a annoncé vouloir « mobiliser un paquet financier sans précédent de 2,6 milliards d'euros[62] » dans les prochaines années pour financer les « priorités de l’Arménie », notamment dans le domaine des transports et des infrastructures avec un soutien important au barreau Sud d’un projet stratégique (qui aurait dû être réalisé il y longtemps déjà), le « corridor nord-sud », devant relier le sud et le nord de l’Arménie, de l’Iran à la Géorgie. Cet investissement de 600 millions d’euros pour cette autoroute dans le Syunik (région sud de l’Arménie revendiqué par l’Azerbaïdjan) est, a contrario du message donné sur les « zones disputées » (voir ci-dessus), un signal fort donné à Bakou et aux acteurs régionaux que l’Union européenne soutient a minima l’intégralité territoriale de l’Arménie en investissant enfin dans ce projet vital pour cette dernière. L’UE soutiendrait ainsi une alternative nord-sud au seul axe panturc est-ouest qui n’aura besoin, pour se réaliser, que de passer par les 30 kilomètres de la région du Syunik. Au final cependant, alors qu’un documentaire d’Arte (« La caviar connexion ») vient de rappeler la corruption de l’Azerbaïdjan au cœur même des institutions européennes, l’Union européenne refuserait de ne pas choisir entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan si elle tenait réellement aux valeurs qu’elle entend incarner : elle soutiendrait l’Arménie ET le Karabagh sans hésitation, y compris et surtout au plan politique et militaire, au-delà de la seule diplomatie du carnet de chèque visant potentiellement à faire accepter à un petit pays désargenté et isolé la nouvelle perte d’un territoire historiquement sien. Pour l’instant, le soutien financier massif qu’elle a annoncé vouloir donner à l’Arménie peut également être interprété comme une forme de prise de pouvoir dans la conduite et les priorités de la politique étrangère arménienne au détriment de la diaspora arménienne qui, bien qu’elle donne beaucoup, n’est pas et ne sera jamais en mesure de mobiliser une telle somme approchant les 3 milliards d’euros. Selon l’adage que l’on traduit au Québec par « Qui paie les violons choisit la musique », l’on peut se demander, à mon avis légitimement, si l’Union européenne ne cherche pas, ce faisant, à imposer une réorientation de la politique étrangère arménienne dans sa dimension de relation à la Turquie notamment, mais pas seulement. Il s’agirait aussi de permettre l’instauration d’une paix a minima (superficielle) compatible (en tant que dénominateur commun) avec les intérêts de toutes les grandes puissances actives dans la région. Le risque d’une paix « néo-libérale » ou « néo-impériale » ? Le risque existe que la paix que l’ensemble des acteurs internationaux, avec le soutien du gouvernement arménien actuel, souhaite imposer aux Arméniens soit une paix a minima, superficielle, que l’on pourrait qualifier de « néo-libérale » ou d’ « impériale ». Comment pourrait-on définir une telle paix ? Tout d’abord comme une paix qui passe, nécessairement, par l’ouverture des marchés et des voies de communication. Cette ouverture est à son tour présentée comme étant nécessairement bonne (en premier lieu au développement économique), alors qu’elle pose bien des questions : par exemple, les intérêts de la nation arménienne sont-ils compatibles avec une telle ouverture dans une région où, du fait de l’hostilité séculaire de la Turquie aux Arméniens marquée par des massacres et des migrations, l’équation démographique est très en défaveur de l’Arménie ? Deuxièmement, une paix « néo-libérale » ou « néo-impériale » ne se préoccupe ni de justice, ni de vérité. Ce n’est pas son sujet. Il n’est donc pas question de parler de « réparations », simplement de « prospérité partagée ». La réparation des injustices commises par le plus fort sur le plus faible n’est pas au menu d’une telle paix. Le risque est grand qu’elle telle paix, imposée, ne fasse que donner un habillage légal, a posteriori, au droit du plus fort, entérinant telles quelles les nouvelles réalités de terrain créées par des puissances impériales (Turquie, Azerbaïdjan) dont les buts de guerre, atteints, auraient ainsi les habits de la légalité. La visite à Chouchi, ville occupée, par près de 50 ambassadeurs à Bakou démontre que les partisans d’une telle paix sont intéressés par les perspectives de profits pour leurs propres agents économiques. Elle est, au demeurant, présentée comme étant sans alternative. Une telle paix est superficielle dans la mesure où elle n’aborde pas les causes profondes du conflit. Elle est donc pas essence injuste pour la partie la plus faible au conflit, la partie lésée. La réorientation de la politique étrangère arménienne qui permettrait l’instauration d’une telle paix se fait d’autant plus facilement que le garant de la sécurité de l’Arménie, la Russie, elle-même une puissance impériale, a déclaré être favorable au rapprochement turco-arménien et est en soutien à l’ouverture des voies de communication dans la région. Le ministre russe des affaires étrangères a d’ailleurs déjà invité les entreprises de transport russes à regarder de près les opportunités à venir dans ce « territoire plein de promesses[63] ». La neutralité de l’Europe, de la Russie et des Etats-Unis lors de la deuxième guerre du Karabagh déclenchée par la Turquie et l’Azerbaïdjan aurait également pu avoir comme bénéfice, du point de vue des puissances, on peut en faire l’hypothèse, de démontrer aux Arméniens d’Arménie l’impuissance relative de la diaspora arménienne à influer de manière significative sur les processus décisionnaires en matière de politique étrangère dans ces grandes puissances (au-delà du seul ministère de la parole). L’un des éléments clés de la réorientation de la politique arménienne serait de ne pas exiger reconnaissance de la vérité historique sur le génocide des Arméniens et, dans une logique néo-libérale, d’obtenir en échange une ouverture des frontières et des marchés. Rappelons ici que la Turquie fait un blocus de l’Arménie depuis la première guerre du Karabagh. La souveraineté de l’Arménie et le sacrifice d’un agenda pan-arménien vieux de plusieurs décennies dans le domaine de la politique étrangère reposant sur des exigences morales fortes de justice et de vérité, mais aussi sur des réparations, seraient-ils un prix que la nouvelle équipe au pouvoir en Arménie serait prête à payer ?

De la responsabilité du Premier Ministre arménien Même si la responsabilité principale de ce qui incombe aux Arméniens provient à mon sens de l’extérieur, la question de la responsabilité du Premier ministre arménien se pose en effet également, de même que celle des gouvernements qui l’ont précédé en termes de gabegies, d’opportunités perdues, d’erreurs, de renoncements, etc. Nikol Pachinyan, pour en rester ici à lui, en véritable animal politique qu’il est, a cherché à se maintenir au pouvoir à tout prix, y compris en contournant son propre ministère des Affaires étrangères, à deux reprises. D’abord avec Zohrab Mnatsakanyan, alors ministre des affaires étrangères, et la déclaration de cessez-le-feu du 10 novembre 2020[64]. Ensuite avec son successeur, Ara Ayvazyan, pour la déclaration traitant de la démarcation des frontières arméniennes[65] qu’il a indiqué vouloir signer le 20 mai 2021 après qu’elle a fuité. Ara Ayvazyan a démissionné le 27 mai 2021[66], le jour même où 6 soldats arméniens ont été capturés par les forces azéries sur le territoire même de la République d’Arménie[67]. De nouvelles concessions territoriales auraient alors été envisagées. L’Arménie n’a pas eu de Ministre des affaires étrangères pendant près de 3 mois avant qu’un proche de Pachinyan soit nommé à ce poste, Ararat Mirzoyan, le 19 août 2021. Lui, tout comme la nouvelle ambassadrice arménienne à Washington, Lilit Makunts[68], n’a aucune expérience diplomatique. Il va sans dire que la « diplomatie » arménienne appliquera dorénavant sans sourciller la politique souhaitée par le chef de gouvernement qui, contre toute évidence, dit voir des signaux positifs d’une Turquie dont le racisme anti-arménien au plan étatique atteint pourtant des niveaux paroxystiques. Pour sa part, Alen Simonyan, le Président de l’Assemblée nationale, est-il allé jusqu’à dire en septembre que les rapports du défenseurs des droits Arman Tatoyan sur les tortures subies par les prisonniers de guerre arméniens à Bakou étaient montés de toute pièce[69] ? Il est assez difficile de démêler le vrai du faux tant l’antagonisme est fort (et contre-productif) entre la majorité et l’opposition. S’il a vraiment tenu ces propos au sujet des rapports étayés et professionnels de l’Ombudman, ils sont éminemment condamnables à la fois au plan moral et au plan de l’efficacité pour la libération de ces hommes. Pachinyan, qui avait été porté au pouvoir par la révolution de velours en 2018, aurait sans doute dû démissionner après la défaite de novembre 2020 et chercher à favoriser la mise en place d’un gouvernement d’union nationale pour soigner les plaies de la deuxième guerre du Karabagh et engager un front uni face à un axe panturc uni et résolu. Au lieu de cela, il s’est lancé dans une polarisation extrême, brandissant par exemple un marteau pendant ses meetings de campagne. S’il a vu sa légitimité réaffirmée par les élections législatives anticipées de juin 2021, dispose-t-il pour autant d’un mandat de fer comme il le répète à l’envie ? La question mérite d’être posée. Nombreux sont celles et ceux qui veulent croire en cet agenda de paix. Il est d’ailleurs difficile de les blâmer tant, on l’a vu, la communauté internationale est aux abonnés absents dans La défense de la démocratie arménienne. La tentation est donc grande de vouloir tourner la page, même si le prix à payer serait immense pour l’Arménie si la paix qui devait être conclue devait être cette paix « impériale » ou « néo-libérale ». D’un autre côté, force est de constater que la liesse populaire n’était pas au rendez-vous du 30ème anniversaire de l’indépendance du pays. Beaucoup d’Arméniens, submergés par le chagrin, ont ainsi préféré bouder les cérémonies du lundi 21 septembre 2021. Au final, il conviendra surement de faire la lumière sur le déroulement de la deuxième du Karabagh tant les questions sont nombreuses : Tout l’armement et toutes les forces à disposition ont-t-ils été utilisés ? Sinon, pourquoi ? La guerre aurait-elle pu être arrêtée à la mi-octobre 2020 ? Des centaines de vies auraient-elles ainsi pu être sauvées ? L’Arménie aurait-elle pu garder le contrôle de la ville symbole de Chouchi comme Poutine l’a affirmé[70] ?, etc. En pleine guerre, Pachinyan a par ailleurs laissé entendre qu'il voulait régler la question arménienne des 500 dernières années[71]. C’est une déclaration à la fois claire et qui interroge, nécessairement. Que voulait-il dire par là ? Savait-il déjà ce qu’il allait faire dans les mois qui suivent ? Enfin, a-t-il refusé une offre de la France dans le domaine sécuritaire[72] ? Si oui laquelle ? La complémentarité entre le droit du plus fort (porté par Moscou, Ankara et Bakou) et la diplomatie du carnet de chèque (Union européenne) est-elle une fatalité ? Y a-t-il place pour une paix juste ?

Face à l’invasion du territoire arménien en plusieurs points, des trois coprésidents du groupe de Minsk, seule la France a vivement réagi, le 13 mai 2021, au plus haut niveau de l’État par la voie du Président Macron[73] qui a demandé le retrait immédiat des troupes azéries du territoire arménien et a indiqué vouloir saisir le Conseil de sécurité de l’ONU. Au moment où ces lignes sont écrites, on ne sait pas quel suivi a été donné à cette déclaration. Comme au début de la guerre en septembre-octobre 2020, les mots du président de la République sonnent justes, mais ils ne sont pas incarnés dans une série d’actions qui auraient donné corps à ces déclarations engagées. Ce faisant, il risque de s’aliéner une grande part des électeurs français d’origine arménienne à l’approche de la présidentielle de 2022. À l’international, le monde a basculé. Les puissances occidentales ont perdu de leur superbe, y compris les États-Unis, comme on vient de le voir en Afghanistan. Les puissances comme la Russie et la Turquie ne connaissent, à l’évidence, que le droit du plus fort et se sentent d’ailleurs plus fortes que jamais. Des territoires comme le Rojava ou le Karabagh en paient le prix fort. Les droits de leurs habitants ne comptent pas. Le droit international semble être instrumentalisé au seul bénéfice des grandes puissances. Les « petits » peuples, comme le peuple arménien, subissent le droit international comme une injustice, sans en bénéficier. Un petit peuple, comme le peuple kosovar, ne peut en bénéficier que si ses intérêts coïncident avec ceux d’une grande puissance (en l’occurrence ceux des États-Unis et de l’OTAN pour le Kosovo).


Pour que les mots d’Emmanuel Macron pèsent dans le Caucase du sud, il faudrait (ou aurait fallu) qu’il les accompagne d’une démonstration de solidarité (et de force) militaire avec l’Arménie, comme il avait su le faire en Grèce en 2020[74], lorsque la souveraineté de celle-ci était régulièrement attaquée par la Turquie en mer Égée. À la fin de cet exercice de solidarité, la Grèce a fini par acheter 18 avions Rafale à la France pour un montant de 2,5 milliards d’euros[75] (elle vient également d’annoncer l’achat de navires de guerre). Il est clair que l’Arménie, dont le PIB nominal annuel est à peine 4 fois supérieur au montant de ce contrat, n’aura jamais les moyens de s’acheter des avions Rafale. Mais l’amitié séculaire entre ces deux pays, revendiquée d’ailleurs par l’un comme par l’autre, ne peut continuer à s’incarner dans les seuls mots ou dans les vers du poète Shiraz, cités par l’ex-Ambassadeur de France en Arménie[76]. Il faut aussi des preuves d’amour (en termes diplomatiques "des actes", comme la France elle-même en réclame aux Etats-Unis suite à la crise des sous-marins avec l’Australie). À défaut, l’axe Bakou-Ankara, avec la complicité de Moscou, n’arrêtera pas tant qu’il n’aura pas obtenu ce qu’il cherche à tout prix: un lien direct entre l’Azerbaïdjan et la Turquie en passant par le Sud de l’Arménie. L’occupation des territoires de la République d’Arménie pourrait par ailleurs être utilisée par Aliev afin de faire pression sur l’Arménie pour conclure un accord de paix le plus rapidement possible dans lequel l’Arménie concèderait que le Karabagh est azéri. À terme, si une telle concession était faite par Pachinyan, cela signifierait un Karabagh vidé de sa population arménienne et de ses monuments arméniens. Comme au Nakhitchevan. Comme en Arménie historique (en Turquie orientale).


De manière générale, même si cela peut sembler un vœu pieu au regard de leurs politiques passées et actuelles, les occidentaux ne peuvent pas laisser l’Arménie seule face à l’axe Bakou-Ankara + Moscou dans les négociations de paix sur le Karabagh. Ils doivent enfin faire réellement pression sur l’Azerbaïdjan pour qu’elles reprennent le plus vite possible dans le cadre d’un règlement global sous la coprésidence du groupe de Minsk de l’OSCE. Le tracé et la démarcation des frontières entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie doivent en faire partie. Surtout, la désoccupation des territoires de l’Artsakh (Karabagh) occupé comme la ville de Hadrout et la détermination du statut juridique final du Karabagh doivent être prioritaires dans le cadre de ce règlement global. Face au dépeuplement arménien garanti du Karabagh si l’Azerbaïdjan devait prendre le contrôle du reliquat de territoire pour l’instant protégé par les soldats russes, la sécession remède du Karabagh apparait comme la seule solution viable au « conflit » du Karabagh. De quoi s’agit-il ? Une population menacée de génocide ou de nettoyage ethnique par l’Etat dont elle dépend peut légitimement revendiquer en ultime recours son droit à l’autodétermination au nom de sa survie et de sa sécurité. Si un peuple a jamais été dans une telle situation, dans un Etat qui a érigé le racisme anti-arménien au rang de racisme d’Etat, ce sont aujourd’hui les Arméniens du Karabagh. Une autre solution consisterait à rattacher le Karabagh à la République d’Arménie, pour les mêmes raisons (un peuple en danger de mort ou d’expulsion de ses terres historiques).


Pour que les Russes acceptent d’aller dans cette direction, et pour que les occidentaux l'acceptent (direction conforme aux idéaux qu'ils prétendent incarner), il faudrait (et cela peut également sembler être un vœu pieu au regard des antagonismes et de la désorganisation actuelle) que l’Arménie et la diaspora présentent un front uni en matière de politique étrangère et coordonnent leurs actions de communication et de plaidoyer au plan international. Cela pourrait passer par un grand raout "Arménie – Diaspora" sur le thème de la politique étrangère, un peu sur le modèle de ce qui avait été fait à Erevan lors du centenaire du génocide des Arméniens. Il est grand temps que les dirigeants actuels de l’Arménie se hissent à la hauteur des enjeux historiques et s’essaient enfin à une politique de rassemblement.


A défaut, cela voudrait dire que le droit du plus fort, malgré les beaux discours, continue d’être la norme au plan international, et que l’occident, avec sa diplomatie du carnet de chèque, s’en ferait le complice éhonté. De même que le leadership de l’Arménie. Cela voudrait aussi dire que demain, à défaut d’une paix juste, de nouvelles déconvenues seraient inévitables pour l’Arménie face à des pays qui restent sur un logiciel panturc, non-démocratique et résolument anti-arménien.


[1] https://www.coulisses-tv.fr/index.php/documentaires/item/19367-«-la-caviar-connection-»,-comment-l-europe-blanchit-des-dictatures,-mardi-28-septembre-sur-arte-vidéo [2] https://www.azatutyun.am/a/31428940.html [3] https://jam-news.net/ilham-aliyev-azerbaijan-is-ready-to-start-negotiations-on-peace-agreement-with-armenia/ [4] https://www.civilnet.am/news/2021/01/20/Turkey-and-Azerbaijan-to-Conduct-Joint-Military-Exercises-in-Kars/416626 [5] https://www.azatutyun.am/a/31448299.html [6] https://m.facebook.com/ZartonkMedia/photos/a.2108679539214335/3487699491312326/?type=3&source=57 [7] https://tass.com/world/1277921 [8] http://en.kremlin.ru/events/president/news/64384 [9] https://armenian.usc.edu/aliyev-makes-territorial-claims-on-armenia-yet-again/ [10] https://www.7sur7.be/monde/j-avais-dit-qu-on-chasserait-les-armeniens-de-nos-terres-comme-des-chiens-et-nous-l-avons-fait~a635a444/?referrer=https%3A%2F%2Fwww.google.com%2F [11] https://www.armenews.com/spip.php?page=article&id_article=73019 [12] https://www.dw.com/en/half-of-nagorno-karabakhs-population-displaced-by-fighting/a-55183758 [13] A la mi-février 2021, des dizaines de milliers d’habitants ont pu rentrer chez eux. La population du Karabagh est malgré tout inférieure de 35000 à ce qu’elle était avant-guerre sur une population de 150000. Il y a donc 35000 réfugiés en Arménie, sans compter 10000 sans-abris au Karabagh. Fin juillet 2021, il y avait encore 21615 réfugiés du Karabagh en Arménie. https://www.eng.kavkaz-uzel.eu/articles/56164/ [14] https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=3405171832883490&id=759921597408540&__xts__[0]=68.ARDfTjva25KeUXmcBf3O66wu81vwr7T6zKs1SM0-NdWRODOyX3ECBM_p07cs2N6ukybAgQeosC5iXsvzgKHU7zBT8UacHfrfZfCz87reMh2XV-BB-BREWF6sV-6k_2HJ-1Vo00zDd8GIpRzAcWqNi4JjytY7puo8IvGvHST5K7paBsYJ8amPn2iYxlSp8InI82TxVdip0W_np5-pJeJKJfpIkVbnf5YG4DyudU3ZC4KCJ-gIxkD_84Mnd-f0BekpoU19sBDyT_CegUhx-reP8n4EmpskNFC4PZE71nusjZ5XqGHMbKWGb2ZMGDvhg4FvYcZlPvRsav7dDHqE9pLOsgWTPA&__xts__[1]=68.ARBvKWKt7cJguw0pWQ_Umw0UxdsKCcPxEDC9gbUdBywqsUsI9_2HQHAI-wc03yamHjzZMGQhf0JJ5eP9X-OuWYLpEWsCHuDQa3a4QPgdk2hD5uzjTzOh4luy2pVZMx0mRxBIcJlFKjB5apwizD_5AJA7W-GOB4MCzCr6WEBw08Il1mpJoz_8WkWeOr5LnKZC0irFEnF4hqdlaYJ5L-5ah4VaZ43_8PzkIA0-6FHH5o_kDlYzqJ_n-2WeqS6f9dWXvlGOdWoaRK3E8DdLa47KuC2w8x1oTGKHOh2C_HsbOYOmkWaKhytv9hwf0Cp5zIrWR4FxOc98EQvVaM4moE86gMVBKg [15] Déclaration du Secrétaire général de l’OTAN, Stoltenberg, le 5 octobre 2020 à Ankara, soit quelques jours après le début de l’offensive turco-azérie. https://www.nato.int/cps/en/natohq/news_178545.htm [16] https://www.tap-ag.com/news/news-stories/tap-completes-successful-euros-39-billion-project-financing# [17] Ce dernier, lors d’un sommet à Bruxelles le 1er octobre 2020 avait en effet déclaré : « Nous disposons d’informations aujourd’hui, de manière certaine, qui indiquent que des combattants syriens ont quitté le théâtre d’opération, des combattants de groupes djihadistes, en transitant par Gaziantep (en Turquie) pour rejoindre ce théâtre d’opérations du Haut-Karabakh. C’est un fait très grave, nouveau, qui change aussi la donne », ajoutant surtout : « Je vais être très clair, dimanche [27 septembre 2020 au matin], les frappes qui sont parties d’Azerbaïdjan, à nos connaissances, n’avaient pas de justifications ». [18] Que l’on peut traduire par « bien immobilier ». https://www.nbcnews.com/think/opinion/armenia-azerbaijan-violence-shows-danger-u-s-diplomatic-indifference-foreign-ncna1242337 [19] https://edition.cnn.com/2020/06/29/politics/trump-phone-calls-national-security-concerns/index.html [22] https://thehill.com/blogs/pundits-blog/foreign-policy/305021-our-ally-turkey-is-in-crisis-and-needs-our-support [23] https://www.brookings.edu/blog/order-from-chaos/2019/11/05/its-time-to-get-us-nukes-out-of-turkey/ [24] https://www.fresnobee.com/opinion/op-ed/article250783979.html [25] https://thehill.com/policy/international/551577-biden-waiving-restriction-blocking-aid-to-azerbaijan-over-armenia [26] https://armenian.usc.edu/us-allocates-100-million-in-security-aid-to-azerbaijan/ [27] https://thehill.com/policy/international/551577-biden-waiving-restriction-blocking-aid-to-azerbaijan-over-armenia [28] https://joebiden.com/2020/10/13/nagorno-karabakh-statement-by-vice-president-joe-biden/# [29] https://nationalinterest.org/feature/blinken%E2%80%99s-cynicism-post-genocide-recognition-emboldens-further-aggression-184283?fbclid=IwAR33eWD1K88y_i8rd2BpFfih3Ujta1NJQpDxjmPaj3Qcmy3DN4Bnu4v0QSE [30] https://oc-media.org/armenian-soldier-killed-in-clashes-along-azerbaijani-border/ https://armenpress.am/eng/news/1056180.html [31] En effet, le 12 mai 2021, les troupes azéries sont entrées illégalement en territoire arménien dans la région du lac Noir (région de Syunik) et dans le marz (région) de Gégharkounik, violant les droits des résidents frontaliers de la République d'Arménie, les intimidant, et maintenant une grande tension au sein de la société arménienne à l'approche des élections législatives anticipées du 20 juin 2021 et dans les semaines qui ont suivi. Le 28 juillet 2021 au matin, les forces armées azéries présentes sur le territoire arménien (province de Gégharkounik) ont lancé une attaque sur des positions arméniennes, tuant 3 soldats arméniens et en blessant deux autres[31], tout en tirant sur les villages arméniens de Sotk, Kut et Verin Shorjah[31]. [32] https://www.state.gov/reports/2020-country-reports-on-human-rights-practices/azerbaijan/ [33] https://www.hrw.org/news/2021/03/19/azerbaijan-armenian-pows-abused-custody [34] https://www.osce.org/minsk-group/483416 [35] https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/dossiers-pays/azerbaidjan/evenements/article/declaration-des-copresidents-du-groupe-de-minsk-de-l-osce-05-05-21 [36] https://armenpress.am/eng/news/1013396/ [37] https://www.whitehouse.gov/briefing-room/statements-releases/2021/04/24/statement-by-president-joe-biden-on-armenian-remembrance-day/ [38] https://www.hyestart.net/post/de-la-crédibilité-des-etats-unis-dans-la-prévention-des-génocides [39] Dans un tweet du 13 mai 2021, Ned Price, le porte-parole du Département d’Etat, a parlé de « tensions » à la frontière et a demandé une « désescalade ». [40] L'Institut international sur le génocide et les crimes contre l'humanité a en effet été créé par le Conseil de l'enseignement supérieur de Turquie en juillet 2021. « Les universitaires disent que le nouvel institut, dont les attributions qualifient le génocide des Arméniens d’être « sans fondement », manquera de crédibilité ». https://www.timeshighereducation.com/news/outcry-over-turkish-research-institute-denying-armenian-genocide [41] https://www.hyestart.net [42] https://www.hyestart.net/les-arts-contre-la-censure [43] https://journals.openedition.org/eac/1385 [44] https://www.aa.com.tr/en/turkey/turkey-to-establish-military-base-in-azerbaijan/612446 [45] https://en.armradio.am/2020/12/28/turkey-building-military-air-base-in-ganja-war-gonzo/ [46] https://www.1lurer.am/en/2021/05/13/Lavrov-and-Bayramov-discussed-tension-on-Armenian-Azerbaijani-border/474530 [47] https://menafn.com/1102105617/Azerbaijani-Belarus-defence-cheifs-visit-military-units-PHOTOVIDEO [48] https://joebiden.com/2020/10/28/nagorno-karabakh-statement-by-vice-president-joe-biden-2/ [49] https://asbarez.com/u-s-house-votes-to-block-u-s-military-financing-and-training-aid-to-azerbaijan/ [50] Dans la soirée, Sentop démenti ces propos, affirmant qu'il n'a pas mentionné la création d'une armée commune, mais seulement des exercices militaires communs. Une source azérie Oxu.az a diffusé une fausse traduction des propos de l'orateur et ces traductions ont ensuite été utilisées par divers médias arméniens. https://www.facebook.com/ZartonkMedia/ Voir post du 29 juillet 2021. [51] http://www.today.az/news/politics/30102.html [52] https://www.lapresse.ca/international/europe/2021-07-03/l-azerbaidjan-libere-15-soldats-armeniens-faits-prisonniers-lors-du-conflit.php [53] https://www.facebook.com/DEARJV/ Voir post du 5 juillet («Geiselnahme ist nicht nur ein Kriegsverbrechen, sondern auch ein Verbrechen im Sinne des Artikels 215 des Strafgesetzbuches von Aserbaidschan») («La prise d'otages est non seulement un crime de guerre, mais aussi un crime en vertu de l'article 215 du Code pénal de l'Azerbaïdjan »). [54] https://en.wikipedia.org/wiki/2020_Nagorno-Karabakh_ceasefire_agreement [55] https://eeas.europa.eu/headquarters/headquarters-homepage/98501/armeniaazerbaijan-statement-high-representative-josep-borrell-border-situation_en [56] https://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2021/07/17/remarks-by-president-charles-michel-after-his-meeting-with-the-acting-prime-minister-nikol-pachinyan-in-yerevan/ [57] https://www.voanews.com/south-central-asia/armenia-says-azerbaijan-captured-6-soldiers-border [58] https://azertag.az/en/xeber/President_Ilham_Aliyev_viewed_activities_of_Chovdar_Integrated_Regional_Processing_Area_owned_by_AzerGold_CJSC_VIDEO-1835767 [59] https://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2021/07/18/remarks-by-president-charles-michel-after-his-meeting-with-azerbaijan-president-ilham-aliyev-in-baku/ [60] https://www.courrierinternational.com/article/projets-bakou-veut-eblouir-le-monde-par-la-splendeur-du-karabakh [61] https://armenianweekly.com/2021/07/20/greece-must-recognize-artsakh-to-atone-for-its-envoys-pr-tour-of-occupied-shushi/ [62] Tiré du même discours de Charles Michel à Erevan le 17 juillet 2021. Le sommet du partenariat oriental (regroupant l’Ukraine, la Moldavie, le Belarus et les trois pays du Caucause du Sud : Arménie, Géorgie, Azerbaïdjan) aura lieu en décembre 2021. Il devrait décider d’un ambitieux plan économique et d’investissement dans la région avec la mobilisation de 17 milliards d’euros sur les prochaines années, dont 2,3 milliards d’euros de subventions, le reste étant des projets d’investissements montés avec la BEI ou la banque européenne pour la reconstruction et le développement. [63] https://en.armradio.am/2021/08/17/lavrov-tells-russian-trucking-companies-to-look-at-nagorno-karabakhs-transit-potential/ [64] https://zartonkmedia.com/2020/11/13/breaking-news-armenias-foreign-minister-states-that-he-was-not-aware-of-the-deal-that-pm-nikol-pashinyan-signed-to-end-the-artsakh-war/ [65] http://arka.am/en/news/politics/factinfo_armenia_s_caretaker_foreign_minister_plans_to_resign_after_learning_about_secret_border_dem/ [66] https://www.azatutyun.am/a/31277188.html [67] https://www.azatutyun.am/a/31276309.html [68] https://www.azatutyun.am/a/31389937.html [69] https://www.aravot-en.am/2021/09/15/289379/ [70] https://eurasianet.org/putin-says-armenia-could-have-stopped-the-war-and-kept-shusha [71] https://www.primeminister.am/fr/statements-and-messages/item/2020/10/21/Nikol-Pashinyan/ [72] https://www.azatutyun.am/a/31382524.html [73] https://www.lefigaro.fr/international/armenie-macron-demande-le-retrait-immediat-des-troupes-azerbaidjanaises-20210513 [74] https://www.france24.com/fr/20200813-tensions-greco-turques-macron-renforce-la-présence-militaire-française-en-méditerranée [75] https://www.lemonde.fr/international/article/2021/01/25/la-grece-a-signe-un-contrat-pour-l-achat-de-18-rafale_6067548_3210.html [76] https://www.1lurer.am/en/2021/05/15/“We-were-at-peace-like-our-mountains-you-came-like-crazy-winds”-Jonathan-Lacôte/475488

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